Réaliser une constatation contradictoire permet d’établir dans le temps un fait pouvant générer un désaccord important avec l’entreprise. En y recourant, l’architecte pose un diagnostic et facilite la détermination ultérieure des responsabilités dans l’intérêt de son client.
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L’architecte n’est ni le surveillant ni le patron du chantier. En tant que concepteur chargé de la direction de l’exécution des contrats de travaux (mission DET), il conseille le maître d’ouvrage sur le déroulement du chantier. En cas de difficultés, le « constat de chantier » permet à l’architecte de signaler à l’entreprise une erreur importante. L’objectif est d’obtenir qu’elle corrige rapidement son travail. Mais également d’informer et de conseiller le maître d’ouvrage.

Rappelons que le constat de chantier résulte de l’opération dite « de constatation ». Ce document fixe dans le temps et de manière contradictoire un fait – un dysfonctionnement du chantier - potentiellement générateur d’un désaccord important entre l’entreprise et le maître d’ouvrage. Il est également un bon support pour la détermination ultérieure des responsabilités.

Une malfaçon flagrante, un risque pour la sécurité, l’utilisation d’un matériau inapproprié, la pose d’un garde-corps non conforme aux normes, le retard dans l’avancement des travaux, l’absence d’une entreprise sur le chantier… figurent en bonne place des motifs pouvant justifier un constat de chantier. De plus, en informant son client à cette occasion, l’architecte exerce efficacement son devoir de conseil.

 

Pas de réglementation

En marché privé, l’entrepreneur n’invoquera pas le vice de procédure : aucun texte n’encadre le constat de chantier. Seule, la norme NF P 03-001, dans sa version actuelle de 2017, prévoit d’y recourir dans l’hypothèse d’une résiliation de marché1. Pour autant, elle n’en décrit pas le déroulement. Du côté des marchés publics, la procédure à suivre est indiquée dans le CCAG travaux de 20092. L’article 12 prévoit que la constatation contradictoire est à l’initiative du maître d’œuvre, éventuellement à la demande de l’entrepreneur ou du maître d’ouvrage. Elle intervient à la date fixée par l’architecte3. Ce dernier dresse le constat lors du rendez-vous en présence de l’entrepreneur et de tout autre acteur jugé utile à la démarche (contrôleur technique ; coordonnateur SPS ; coordinateur OPC ; autre entreprise…). Les marchés privés peuvent largement s’inspirer de cet article du CCAG (voir encadré « Constatations : comment s’y prendre ? »).

Rappelons que le CCAG travaux, tout comme la norme NF P 03-001, n’est applicable que lorsqu’il est cité en référence dans le marché de travaux.

 

Constat explicite

La MAF recommande à ses adhérents d’utiliser la procédure de constat qui, bien souvent, est l’aboutissement logique de leur devoir de conseil auprès du maître d’ouvrage. Un chapitre de sa Boîte à outils chantier y est d’ailleurs consacré4. Un exemple de constat de non-conformité d’un produit de construction est proposé (Outil 15A). Soulignons au passage l’importance pédagogique des pièces jointes au procès-verbal : photos prises sur place ; bon de livraison du produit de construction remis par l’entreprise ; plan d’exécution fourni par l’entreprise ; références réglementaires, Avis technique (ATec) ou Appréciation technique d’expérimentation (ATEx), etc. Elles constituent autant d’informations en vue de la résolution d’un éventuel désaccord.

Notons que le constat de chantier n’est généralement pas suffisant pour régler les dysfonctionnements du chantier les plus graves. Selon les cas et la réglementation applicable au marché, le constat devra être suivi d’un ordre de service, d’une mise en demeure, de l’intervention du maître d’ouvrage… voire de l’engagement d’une procédure de résiliation de marché de travaux5.

 

Constatation : comment s’y prendre ?

(D’après l’article 12 du CCAG marchés publics de travaux)


Le maître d'œuvre, l’entreprise ou un autre acteur du chantier peut être à l’origine de la demande d’une opération de constatation. Dans tous les cas, c’est le maître d’œuvre - ou le maître d’ouvrage si le maître d’œuvre ne réagit pas - qui l’initie et fixe la date du rendez-vous. Cette date n’excède pas huit jours après celle de la demande. Les constatations donnent lieu à un document - le constat - dressé séance tenante par le maître d'œuvre et contradictoirement avec l’entreprise titulaire du marché. Si cette dernière refuse de signer ce constat ou ne le signe qu'avec réserves, elle doit, dans les quinze jours qui suivent, préciser par écrit ses observations ou réserves au maître d'œuvre. Si l’entreprise n'est pas présente ou représentée, elle est réputée accepter sans réserve le constat qui en résulte.

Concernant les travaux qui ne pourraient faire l'objet d’une constatation ultérieure, notamment lorsque l’ouvrage est destiné à être caché ou inaccessible, l’entreprise doit demander une constatation contradictoire en temps utile. A défaut, l’entreprise ne sera pas fondée à contester la décision du maître d'œuvre sur ces travaux concernés.

 

 

1. Article 22.4.1.1 Constatation de l’état des travaux.

2. Arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux.

3. De préférence, par lettre recommandée avec accusé réception réceptionnée au moins deux jours avant la date de constatation.

5. A propos du constat contradictoire de défaillance, voir aussi : « Ce qu’il faut faire en cas de défaillance de l’entreprise » publié sur MAFCOM