L’emploi de matières premières issues du végétal - ou de l’animal - impose le respect des règles techniques les concernant. Des défauts récurrents de conception et de mise en œuvre émanent des retours d’expérience.

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Dopés par la prise de conscience sur l’écologie, les biosourcés gagnent du terrain1. Leurs mises en œuvre sont-elles pour autant au-dessus de tout soupçon ? Ces matériaux vertueux dont certains sont nouveaux ont-ils une pathologie qui leur est propre ? La redécouverte des vertus environnementales de la plupart d’entre eux s’accompagne progressivement de la création de règles professionnelles, voire de la mise à jour des règles existantes pour faciliter leur intégration dans les techniques courantes actuelles. Parallèlement à ce contexte règlementaire, les organismes de recherches mènent des études sur leur développement, leur qualité et leur durabilité. Retenons surtout que les biosourcés sont des produits de construction comme les autres : la conception des bâtiments qui y recourent est exigeante et les mises en œuvre nécessitent un vrai savoir-faire. Rappelons par exemple la règle d’or de conception des bâtiments en bois qui consiste, en environnement humide, à les doter « de bottes et d’un grand chapeau » ; autrement dit, à les prémunir de la pluie en façade et des remontées capillaires dans les murs... Cette formule illustre le bon sens dont les constructeurs doivent aussi faire preuve dans l’utilisation des nouvelles techniques.

Voici un aperçu de quelques points de vigilance pour quatre d’entre eux : la paille de blé, le chanvre, la fibre de bois et la ouate de cellulose.

 

PROTECTION CONTRE L’HUMIDITÉ

La plupart des matériaux biosourcés sont hygroscopiques et putrescibles : ils ont tendance à absorber l’humidité de l’air et à se décomposer par l’action des bactéries et des champignons. Ainsi, quelques bonnes pratiques doivent être rappelées : le stockage sur le chantier de la paille de blé, des panneaux de fibre de bois ou de la ouate de cellulose en vrac, en rouleau ou panneau, présente un risque élevé de dégradation à l’humidité. L’entreposage avant la mise en œuvre se fait sous haute protection. Les infiltrations causées par la pluie, le terrain humide, les incidents de chantier… provoquent facilement des dégradations des protections et des moisissures.

Pendant les travaux, les manipulations de caissons préfabriqués doivent éviter les chocs et les perforations lors des levages. Les risques d’endommagement générés par les autres corps de métier ne doivent pas être négligés. Notons également que les bétons et mortiers de chanvre sont mis en œuvre par la voie humide, avec des règles professionnelles à respecter : l’eau de gâchage constitue un risque de dégradation des bois à leur contact (aspect et/ou fibre). Il est impératif d’intégrer un délai de séchage suffisant dans le calendrier du chantier et de veiller à la bonne ventilation de l’ouvrage.

Une fois en œuvre, ces matériaux doivent être protégés : les ouvrages sont réalisés au sec, éventuellement sous un parapluie (un chapiteau) ou à l’abri du toit ; les façades qui n’ont pas encore reçu leur finition sont bâchées ; les pieds de murs sont isolés par une coupure de capillarité… Les apports d’humidité non maîtrisés par les autres corps de métier constitue un risque de dégradation. Tous les moyens sont bons pour protéger le matériau sans pour autant confiner l’humidité qui lui est propre au moment de sa mise en œuvre.

Le choix du pare-vapeur et le soin apporté à l’étanchéité à l’air du volume construit constitue les facteurs clés de la pérennité de l’ouvrage. En cas de fuite provenant des réseaux d’eau intérieurs, le séchage complet des matériaux biosourcés est impératif. Le futur habitant d’un bâtiment « biosourcé » doit y être sensibilisé pendant la durée de vie du bâtiment.

 

PONTS THERMIQUES, RISQUE INCENDIE ET TERMITES

Les biosourcés n’échappent pas aux risques de ponts thermiques. Ils sont à surveiller au niveau de l’isolation des pieds de murs et des fondations, ou sur les jonctions entre les découpes lors de la mise en place des panneaux de fibres de bois notamment. Avec le temps, ils peuvent apparaître avec le tassement de la ouate de cellulose, dans les parois de grande hauteur sans recoupements horizontaux. Ce défaut peut être le résultat d’une mauvaise mise en œuvre ou d’une mauvaise qualité des produits : la ouate de cellulose doit être insufflée par le bas tout veillant à sa bonne répartition à l’intérieur des caissons.

Rappelons que le risque lié à l’incendie impose de respecter des distances entre les matériaux et les équipements de production de chaleur en particulier ; ou de ventilation des plénums dans les plafonds dotés de spots lumineux, par exemple. Signalons le risque lié aux termites nécessitant la mise en place de barrières dans les zones géographiques concernées et qui met en péril les ouvrage en bois et fibre de bois. Rappelons également le risque lié à la présence de rongeurs…

Les isolants biosourcés se mettent en œuvre comme tous les autres matériaux - avec discernement et bon sens - dans de bonnes conditions, en connaissant leurs caractéristiques spécifiques et les règles professionnelles correspondantes.

 

POUR EN SAVOIR PLUS :

 

12 POINTS DE VIGILANCE…

(D’après « Matériaux biosourcés : 12 enseignements à connaître » publié par l’Agence qualité construction et energivie.pro)

  1. Tassement de la ouate de cellulose insufflée au sein de la paroi ;
  2. Discontinuité à la jonction des isolations thermiques intérieure et extérieure ;
  3. Ponts thermiques et infiltration d’air à la jonction des planchers et mur de refend en isolation intérieure ;
  4. Ponts thermiques au droit des montants d’ossature bois en isolation en bottes de paille ;
  5. Transmission des bruits aériens due à la faible masse de l’enveloppe ;
  6. Transmission des bruits d’impact au niveau des jonctions plancher bois/murs ;
  7. Percement de l’étanchéité à l’air dû au passage des réseaux électriques ;
  8. Dégradation de la structure bois due à l’absorption de l’eau contenue dans le béton de chanvre ;
  9. Tassement du béton de chanvre dû à un excès d’eau de gâchage ;
  10. Déchirement accidentel de la membrane d’étanchéité à l’air pendant le chantier ;
  11. Défaut d’étanchéité à l’air par fissuration de l’enduit en terre intérieur ;
  12. Perte d’éclairement naturel et diminution d’apport thermique dues à la surépaisseur d’isolation au pourtour de baies existantes.

 

1 Lire « Matériaux biosourcés (1/2) : de quoi s’agit-il ? » paru dans MAFCOM