Les biosourcés seront-ils les matériaux de construction du 21e siècle ? La question n’a rien d’anecdotique au regard des enjeux liés au changement climatique et à l’épuisement de ressources naturelles. Ces matériaux ont la cote auprès de constructeurs impatients d’en découdre avec les produits de construction énergivores et non renouvelables. Les biosourcés cumulent en effet de solides atouts : stockage du CO2 sur leur durée de vie, valorisation facile, disponibilité locale et participation à l’économie locale. Contrairement aux process nécessitant des transformations à haute température (ciment et acier notamment), les biosourcés sont peu consommateurs d’énergie.
Mais, de quels matériaux parle-t-on ? Suivant la définition européenne normalisée, les biosourcés intègrent une part de biomasse dans leur composition. Ce sont des matières premières issues du végétal - ou de l’animal à l’exclusion des matériaux fossiles non renouvelables, tel que le pétrole. Ainsi, le bois, le chanvre, la paille de céréales ou d’oléagineux, la laine, le lin, l’amidon de maïs, le liège, les roseaux… appartiennent à la longue liste des matériaux biosourcés1. Leurs différentes transformations permettent d’obtenir des composants destinés à leur intégration dans des produits de construction : bois de structure ; granulats de bois, de chanvre ou de lin avec un liant minéral destinés à la fabrication de bétons2 porteurs ou non ; pailles3, matières végétales recyclées, enveloppes de la graine végétale utilisées comme isolants ; huiles végétales4… Parmi les grands classiques, citons bien évidemment le bois, mais également le linoléum. Ce dernier est fabriqué à partir d’huile de lin et de farine de bois.
Ces matériaux sont renouvelables à condition qu’ils s’inscrivent dans une démarche durable - et locale - de renouvellement de la ressource. Le bois doit être issu de forêts gérées durablement (certifiées PEFC, par exemple). Précisons toutefois que la terre crue et la pierre ne sont pas considérées comme des matériaux biosourcés.
Matières appropriées à la rénovation thermique
Les biosourcés connaissent de beaux succès dans leurs utilisations. La palme d’or étant détenue depuis longtemps par le bois en charpente, menuiserie intérieure et menuiserie extérieure. Aujourd’hui, la fibre de bois, la ouate de cellulose, le chanvre… connaissent une belle progression dans la production d’isolants thermiques sous ses formes variées (rigides ou semi-rigides, en vrac5) avec des mises en œuvre traditionnelles par panneaux, soufflage, projection humide ou insufflation... selon les caractéristiques du matériau. Soulignons que leur comportement hygrothermique est souvent adapté à la rénovation thermique du patrimoine ancien puisqu’ils présentent des caractéristiques semblables à celles des matériaux employés dans les bâtiments avant 1945 : porosité, perméabilité à la vapeur d’eau, etc. Ils sont mis en œuvre dans la rénovation de ce type de bâtiments et améliorent les performances thermiques sans désordre.
Reste que le succès de l’utilisation des biosourcés dans le secteur de la construction repose sur l’information des maître d’ouvrage (un label « Bâtiment biosourcé » a notamment été mis en place en 20126). La formation et l’amélioration du savoir-faire des maîtres d’œuvre et des entreprises sont indispensables à la maîtrise des techniques nouvelles. L’industrialisation des process s’avère également incontournable pour abaisser rapidement les coûts et banaliser des mises en œuvre à surveiller (A suivre dans MAFCOM : « Matériaux biosourcés (2/2) : la mise en œuvre sous surveillance »).
Pour en savoir plus :
- « Les matériaux biosourcés », 163e table ronde nationale technique et juridique, focus technique et règlementaire : http://cneaf.fr/wp-content/uploads/2018/12/CR-163eTRNTJ-du-25-octobre-2018.pdf
- « Matériaux bio-sourcés : 12 enseignements à connaître », par le Pôle observatoire de l’Agence qualité construction et le Centre de ressources du bâtiment durable energievie.pro pour les professionnels du bâtiment en Alsace.
Des atouts imbattables :
- Matériaux renouvelables ;
- Le stockage de CO2 sur leur durée de vie
- La consommation minime d’énergie grise (quantité d’énergie consommée lors du cycle de vie d'un matériau ou d'un produit, dont la production, la transformation, le transport) ;
- Matériaux recyclables ou valorisables ;
- Utilisation privilégiée des gisements des ressources régionales, des filières courtes et de l’économie locale ;
- Possibilité d’amélioration de la qualité sanitaire et de l’air intérieur ;
- Comportement hygrothermique adapté à la rénovation thermique du patrimoine ancien.
1. On peut ajouter : les déchets de papier, de carton et de coton recyclés, le miscanthus, les plumes de canard, le chitosane (crustacés), le bananier, la canne à sucre, le coco, le bambou…
2. Les bétons de chanvre sont régis par des règles professionnelles ; des Appréciations technique d’expérimentation (ATEX) et des Avis techniques (ATEC) existent pour certains produits préfabriqués.
3. Remplissage de parois en ossature bois, paille porteuse, Isolation thermique par l’extérieur (ITE) en bottes de paille... La construction classique en ossature est, pour sa part, soumise au cadre normatif des règles professionnelles portées par le Réseau français de la construction paille (RFCP).
4. Lire notamment l’article intitulé « Diversification des granulats végétaux et ouverture à la préfabrication » paru dans Qualité construction n° 167 de mars/avril 2018, la revue de l’agence qualité construction (AQC).
5 Les isolants en vrac sont intégrés dans un cadre normatif classique. Les fabricants sont représentés par l’Association des industriels de la construction biosourcée (AICB) et le Syndicat des producteurs européens de ouate de cellulose (ECIMA, European cellulose insulation manufacturers association).
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